jeu. 6 au jeu. 20 octobre
Installation, Art numérique, Arts visuels
entrée libre
présenté avec COAL
Dans le cadre du forum européen Where to Land
L’océan est à la croisée des destins. S’il est un stabilisateur du climat, le plus grand puits de carbone et le plus vaste réservoir de biodiversité, l’océan succombe sous les multiples menaces : réchauffement, montée du niveau des eaux, acidification et désoxygénation, surexploitation des ressources halieutiques, pollution plastique, dégradation des habitats marins, prolifération des espèces invasives… L’augmentation sans précédent du trafic maritime fait partie des plus importantes causes de dégradation des écosystèmes océaniques. Capucine Vever fait partie des artistes qui ramène ces questions, souvent invisibles à l’œil nu, à la surface de l’eau. Ces deux œuvres abordent l’océan par ce qu’il a à la fois de plus sauvage et de plus domestiqué.
Film 4K et son binaural, 14min36 sec
Par une dissociation entre image et espace sonore, le film La Relève, tourné uniquement depuis le sémaphore du Créac’h posté en fin de terres sur l’île d’Ouessant, joue de contraste entre des images contemplatives de l’espace océanique – la vision commune d’un océan sauvage et authentique – et une voix qui décrit l’intense activité qui s’y déroule mais que l’on ne voit plus depuis les côtes. La narratrice est invisible, sa présence est suggérée par les mouvements d’une caméra subjective qui se balade au sein de ce sémaphore dont la fonction était de porter (phoros) le signe (sema).
Gravures : 284,5 x 218,5cm (chaque gravure 69,5 x 91,5 cm) imprimées sur les presses des Ateliers Moret par Matthieu Perramant
Aquarium : 120x85x20cm
Le projet s’intéresse à l’intense activité du trafic maritime en haute mer, un espace éminemment politique. Par-delà l’horizon, les trajets empruntés quotidiennement par les cargos dessinent en creux une carte du monde où les continents apparaissent tels des fantômes. Retracée frénétiquement à la main, la carte est ensuite gravée à l’eau forte sur une plaque de cuivre, la matrice, elle-même replongée neuf fois dans l’acide après chaque impression, la carte initiale devenant une image abstraite. Le « restant » de matrice est exposé dans un aquarium d’eau de mer aux côtés des neuf impressions. Cette installation propose un détournement formel du trafic maritime grâce à un ancien procédé : la photogravure en taille douce. Éprouvée jusqu’à l’épuisement, la carte rendue illisible par ce processus qui ronge et mord la matière avec de l’acide est une métaphore des effets lents et irréversibles de l’activité humaine sur le milieu aquatique. Exposée dans un bain d’eau de mer, la matrice subit une oxydation progressive du cuivre par le sel de mer insufflant une temporalité à l’œuvre.
Capucine Vever (1986—, France) développe un travail contextuel s’intéressant à la notion d’invisible, d’inatteignable et d’imperceptible. Qu’il soit géographique, social ou culturel, le territoire est central dans sa démarche artistique. Sa pratique tente de s’y engager dans un rapport poétique en exploitant le potentiel narratif de chaque espace. Ses œuvres procèdent par collages, analogies, frottements permanents entre réalité et action, recherche scientifique et narration, cartographie et légende, déplacement et immobilisme. Son travail s’élabore fréquemment lors de résidences : à Évry (Grand Paris Sud, 2019), Finis terrae au sémaphore d’Ouessant (2018), Eremi Arte (Abruzzes, Italie, 2017), NEKaTOENEa (Hendaye, 2017), In Situ (Conseil général de la Seine-Saint-Denis, 2016), la Maison des arts de Malako (2014), La Pommerie (Saint-Setiers, 2013). En 2021, elle reçoit le Prix Michel Nessim Boukris. En 2022, Capucine Vever est distinguée par le Prix COAL sur les Océans.